Un employeur et un salarié qui ont besoin de travailler ensemble régulièrement à travers des CDD successifs peuvent recourir à un contrat cadre pour établir les bases durables de leur relation.

Dans l’Instant Pro #2, nous avions déjà évoqué ensemble la question de la rupture de CDD signés par avance et je vous avais invité à la prudence sur cette pratique. On peut pourtant la comprendre : l’employeur s’assure ainsi d’une main d’œuvre qu’il connaît et le salarié s’assure d’un emploi qu’il souhaite. Mais c’est aussi une situation contractuelle dans laquelle les parties sont enfermées. Et qui peut poser souci en cas de faute grave du salarié.

Employeurs, surtout, n’envisagez pas d’insérer dans vos CDD une clause de résiliation unilatérale, en vous disant que si ça se passe mal un jour dans un CDD vous pourrez résilier les CDD à venir. La jurisprudence considère en effet qu’il s’agit alors d’un CDI et vous feriez face en ce cas à un licenciement abusif (Soc. 22 décembre 1988, pourvoi n° 85-42.209).

Insérer des périodes d’essai dans les CDD n’est pas non plus une option et cela est même interdit en cas de succession de CDD sur un même poste puisque les compétences du salarié n’ont plus besoin d’être testées (Com. 5 octobre 2016, pourvoi n° 15-16.384).

Alors la solution peut venir de l’établissement d’un contrat-cadre entre les deux parties. Contrat par lequel l’employeur s’engage à faire appel au salarié pour les besoins futurs. Il me semble que le salarié ne peut s’obliger par avance à répondre présent, ce serait contraire à sa liberté de travailler et surtout cela le mettrait dans un état de disponibilité permanente vis-à-vis de l’employeur. C’est donc incitatif pour le salarié.

Que prévoir dans la convention-cadre, au-delà de son objet principal ? Surtout pas les mentions qui doivent figurer dans les CDD eux-mêmes. Contrat-cadre et CDD sont indépendants et s’il manque des mentions obligatoires dans le CDD alors ce n’est pas le contrat-cadre qui vous sauvera de la requalification en CDI.

C’est dans les CDD que vous continuerez de mentionner le motif du recours. Dans le domaine de la culture, vous ferez parfois recours au CDD dans le cadre d’un usage. L’annexe de l’accord national interprofessionnel du 24 mars 1990 fixe la liste des secteurs d’activité qui peuvent y recourir et on y retrouve notamment le spectacle, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinématographique et l’édition phonographique. Sur ce point, j’attire votre attention sur le fait que le contrat doit mentionner les éléments concrets et précis qui prouvent le caractère temporaire de l’emploi (Soc. 23 janvier 2008, pourvoi n° 06-44.197). Il ne suffit pas d’être dans un des secteurs mentionnés pour que tous les emplois relèvent du CDD d’usage.

Et attention, le recours au contrat-cadre ne vous dispense pas d’être vigilant sur le délai de carence en cas de succession sur un même poste ou sur le délai d’attente en cas de succession sur des postes différents. Sauf CDD d’usage évidemment.

Donc dans le contrat-cadre, vous pouvez, vous entendre sur la présence ou non de période d’essai s’il s’agit de CDD sur des postes différents, sur le salaire minimum proposé, sur le lieu de travail proposé, etc. Ce qui peut d’ailleurs renforcer le caractère incitatif pour le salarié. Et bien sûr, vous pouvez inclure une clause résolutoire du contrat-cadre notamment en cas de commission d’une faute grave à l’occasion d’un CDD.

Julien MONNIER – Avocat au Barreau de Nantes