Afin de soutenir et favoriser la filière musicale, l’État a créé en 2006 un crédit d’impôt phonographique permettant aux producteurs de déduire jusqu’à 30 % de leurs dépenses de production. Un dispositif toujours en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022, particulièrement intéressant pour les labels indépendants.

Parmi la jungle des crédits d’impôt, celui qui concerne les dépenses de production d’œuvres phonographiques, prévu à l’article 220 octies du code général des impôts (CGI), reste, malgré son ancienneté, largement méconnu. La faute, sans doute, à la lourdeur d’un dispositif qui oblige à solliciter un agrément préalable du ministère de la Culture. Pour autant, ce crédit d’impôt, pour peu que l’on ne souffre pas de phobie administrative, est un formidable levier pour les labels et producteurs de disques.

Un crédit d’impôt pour les producteurs de musique enregistrée

Le crédit d’impôt concerne les entreprises de production phonographique au sens de l’article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle (CPI). Il s’agit des personnes morales, labels et maisons de disques produisant des phonogrammes, qui ont donc « l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de son », c’est-à-dire de la bande master (entreprises dont le code NACE-APE est le plus souvent 5920Z). Mais sont aussi concernées les entreprises ayant signé un contrat de licence avec l’entreprise de production phonographique initiale ou ayant fait l’acquisition de la bande master.

Toutes les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés sont éligibles, quelle que soit leur forme (sociétés commerciales, associations, etc.).

Un crédit d’impôt réservé aux « nouveaux talents »

Ouvrent droit au crédit d’impôt les dépenses engagées pour la production, le développement et la numérisation d’un enregistrement phonographique, mais aussi d’un enregistrement vidéographique musical. Les productions peuvent porter sur des albums de « nouveaux talents », définis comme les artistes n’ayant pas dépassé le seuil de 100 000 ventes pour deux albums distincts précédant ce nouvel enregistrement. Une condition d’expression française pour la moitié des œuvres concernées est également exigée, sauf si elles sont dans le domaine public (on peut penser à la musique classique par exemple).

30 % du montant des dépenses de production

Le crédit d’impôt est calculé au titre de chaque exercice fiscal. Il est égal à 30 % (15 % pour les non PME) du montant total des dépenses de production (rémunérations, frais de studio, conception graphique), de post-production (montage, mixage, mastering) et des dépenses liées au développement de ces productions (scène, émissions de télévision ou de radio, création de site web, base de données numérisées…). Les dépenses de développement éligibles au crédit d’impôt sont toutefois plafonnées à 350 000 euros par enregistrement et la somme des crédits d’impôt ne peut excéder 1,1 millions d’euros par entreprise et par exercice. Il faut également noter que les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des dépenses ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit.

Une procédure lourde

L’obtention du crédit d’impôt est soumise à deux agréments successifs délivrés par le ministère chargé de la culture. Un agrément provisoire doit être sollicité avant l’engagement des opérations de production, permettant d’attester que la demande formulée par l’entreprise de production et que l’œuvre choisie remplissent les conditions du crédit d’impôt phonographique. Une fois le projet réalisé, un agrément à titre définitif doit être obtenu, attestant que l’œuvre satisfait effectivement aux conditions d’éligibilité du crédit d’impôt. Ces deux agréments sont délivrés après avis d’un comité d’experts.

Par ailleurs, d’autres formalités sont nécessaires sur le plan purement fiscal. L’entreprise doit déposer la déclaration spéciale relative au crédit d’impôt phonographique n° 2079-DIS-SD (CERFA n° 13064) avec le relevé de solde d’impôt sur les sociétés auprès du comptable de la direction générale des finances publiques. Une copie de cette déclaration est adressée par l’entreprise dans le même délai au ministère de la culture. Signalons enfin que l’administration fiscale dispose d’un droit de contrôle qui s’exerce jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle le crédit d’impôt phonographique a été imputé ou restitué.

 Marc de Rievaulx