La crise sanitaire provoquée par le coronavirus touche de plein fouet le secteur culturel, affectant aussi la santé économique de tous ses acteurs. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles dont fait partie l’accès à l’activité partielle pour les intermittents du spectacle. Bilan de ce que nous avons appris au fil des communiqués, décrets et applications, en espérant une sortie de l’état d’urgence sanitaire au plus vite…

Les informations recueillies à l’heure de la mise sous presse sont susceptibles de modifications ultérieures.

Mars 2020, entrée en matière

L’activité partielle, anciennement chômage partiel : qu’est-ce ?

« L’activité partielle est un outil au service de la politique publique de prévention des licenciements économiques qui permet à l’employeur en difficulté de faire prendre en charge tout ou partie du coût de la rémunération de ses salariés. Elle est encadrée par les articles L. 5122-1 et suivants et R. 5122-1 et suivants du Code du travail. Face à l’ampleur de la crise sanitaire liée à la COVID-19, le gouvernement a décidé de transformer structurellement le dispositif d’activité partielle, pour doter la France du système le plus protecteur d’Europe. Le décret n°2020-325 du 25 mars 2020 met en œuvre cette réforme. » (travail-emploi.gouv.fr)

Tout type de structure – entreprises et associations – employant des salariés, et tout type de salarié, en CDI ou en CDD, permanent ou intermittent sans durée minimale du contrat de travail ni condition d’ancienneté, peuvent recourir au dispositif.

Le contrat de travail en activité partielle est suspendu, le salarié est indemnisé par son employeur à la date habituelle du versement de son salaire, et l’entreprise reçoit l’allocation de l’État correspondant aux heures dites chômées.

Le secteur culturel éligible sous conditions

Le ministère de la Culture a précisé les conditions dans la FAQ des employeurs culturels face aux impacts de la crise de coronavirus, publiée le 27 mars 2020 : « Dès lors qu’il y a signature d’un contrat de travail ou promesse d’embauche formalisée avant le 17 mars, date de début du confinement, l’employeur pourra solliciter le bénéfice du dispositif au titre des périodes contractuellement prévues. Il est toutefois à noter que cette doctrine ne s’appliquera que pendant la crise sanitaire et uniquement pour les cas où la suspension de l’activité est liée à la COVID-19. »

Une date reportée ne peut être prise en charge au titre de l’activité partielle si un avenant au contrat de travail, fixant une date précise du report, n’est pas signé entre l’employeur et le salarié. En revanche, si elle est reportée sans date d’exécution prévue au moment de l’annulation, elle pourra être prise en compte par l’activité partielle, ce cas étant assimilé à une annulation. Si la date venait à être reprogrammée à une date ultérieure non connue au moment du report, les services du ministère du Travail ne sauraient demander le reversement des sommes perçues à ce titre.

Pour les associations, l’activité, même annulée, ne doit pas être financée par des subventions. En effet, le recours à l’activité partielle ne saurait conduire à ce que les charges de personnel des associations soient financées deux fois, une première fois par les subventions qu’elles perçoivent en temps normal, et une seconde fois par l’allocation d’activité partielle. Des contrôles seront réalisés a posteriori ; en cas de constat d’un financement en doublon, les subventions seront ajustées à la baisse.

Appel à la solidarité professionnelle

Le ministre de la Culture, dans un communiqué publié le 18 mars 2020, demande aux structures les plus solides financièrement, ainsi qu’à ses opérateurs et aux structures subventionnées par l’État, de faire jouer la solidarité en payant les cessions prévues aux compagnies et en honorant les cachets des intermittents afin de ne pas les fragiliser. Dans la mesure du possible et dans une démarche de solidarité professionnelle, il est par ailleurs recommandé aux employeurs d’honorer les promesses d’embauche, à l’instar des contrats signés.

Règles de calcul

Montant de l’indemnité à verser au salarié

L’indemnité due au salarié couvre au minimum 70 % de sa rémunération brute prévue dans son contrat, soit environ 84 % du salaire net. Dans tous les cas, un minimum de 8,03 € par heure doit être respecté. Un employeur peut indemniser ses salariés au-delà de 70 % du salaire brut s’il le peut/souhaite ou si une convention collective ou un accord d’entreprise le prévoit.

La détermination du nombre d’heures donnant lieu au versement de l’indemnité pour les salariés rémunérés au cachet est la suivante : 1 cachet = 7 heures. Pour les salariés rémunérés à l’heure, un dépassement au-delà de 7h par jour est possible. Pour l’ensemble des salariés, la règle s’applique dans la limite de la durée légale du travail, c’est-à-dire 35 heures par semaine.

Montant de l’allocation d’État remboursée à l’employeur

Dans le secteur culturel et lorsque le taux horaire indemnisé ne dépasse pas la limite de 4,5 Smic, le montant de l’indemnité à verser au salarié est égal au montant de l’allocation d’État remboursée à l’employeur.

Reste à charge pour l’employeur

Le reste à charge des employeurs du secteur culturel est d’environ 16 %. Il est calculé sur l’indemnité d’activité partielle brute et comprend les congés spectacles (15,40 %) et la prévoyance (0,42 %). La totalité des heures chômées est prise en compte pour le calcul de l’acquisition des droits aux congés payés selon l’article R. 5122-11 du Code du travail.

Prise en compte des heures chômées par Pôle Emploi

Les attestations employeur mensuelles (AEM) sont à établir en tenant compte des indications suivantes : pour le renouvellement du régime de l’intermittent, chaque jour d’activité partielle est assimilé par Pôle emploi à raison de 5 heures de travail à compter du 1er juin 2020 (7 heures jusqu’au 31 mai 2020). Et ceci, même si le contrat prévoit une journée d’une durée inférieure. Le double cachet compte pour 5h sur 1 jour à partir du 1er juin (14 heures sur 1 jour jusqu’au 31 mai).

Démarche administratives auprès de la DIRECCTE

Demande d’autorisation préalable à l’activité partielle (DAP)

Vous devez créer un compte sur le site dédié à l’activité partielle (https://activitepartielle.emploi.gouv.fr/aparts/) et valider votre structure pour effectuer une DAP. Vous avez jusqu’à 30 jours à compter du jour où vous placez vos salariés en activité partielle pour déposer cette demande avec effet rétroactif. Si le délai est dépassé, il vous faudra argumenter votre dossier !

Faites attention aux informations importantes qui conditionneront votre dossier : le motif de recours (circonstances exceptionnelles + coronavirus), les circonstances détaillées et la situation économique à l’origine de la demande, la période d’activité partielle, le nombre de personnes concernées et le nombre d’heures chômées. Dorénavant, l’autorisation d’activité partielle peut être accordée pour une durée maximum de 12 mois (contre 6 mois actuellement au maximum). La DAP doit être motivée : il est conseillé de joindre des justificatifs d’annulations des représentations, enregistrements, tournages et autres… Pour les structures d’au moins 50 salariés, le Comité Social et Economique (CSE) doit être consulté, son accord doit être fourni à la demande.  Après envoi de la DAP, la DIRECCTE notifie sa décision à l’entreprise par courriel de l’Agence de services et de paiement (ASP) sous 48 h ; l’absence de réponse vaut décision d’accord. Cette décision ouvre le droit à l’application du régime légal de l’activité partielle.

Demande d’indemnisation (DI)

Chaque mois, créez une nouvelle DI en vous munissant du code que l’ASP vous a attribué dans son courriel : « Notification de décision tacite d’autorisation au titre du dispositif d’activité partielle ». L’allocation de l’État est maintenue à 70 % pour le secteur de la culture. Sur vos bulletins de paies, à la ligne « Indemnisation activité partielle », sont mentionnées les données pour remplir convenablement votre DI : le nombre d’heures chômées, le taux horaire et le montant de l’indemnisation en activité partielle brute pour chaque salarié.

Chaque salarié est à ajouter dans le tableau « Gestion des salariés ». S’il est rémunéré au cachet, la forme d’aménagement à sélectionner est le « 5= Forfait annuel en jours », en heures le « 9= Personnel Navigant ou Autres ».

L’allocation de l’État est calculée automatiquement en remplissant le tableau de la saisie des heures chômées par salarié. Elle est versée à l’entreprise par l’ASP dans un délai moyen de 12 jours. En cas d’erreur après envoi, il est possible de faire une régularisation. Pour plus d’informations, contactez l’ASP au 08 00 70 58 00.

Sanctions en cas de fraude

Les employeurs qui mettent en place l’activité partielle sans répondre aux critères légaux s’exposent à des sanctions : le paiement des salaires et charges pour les périodes indûment indemnisées au titre de l’activité partielle, le reversement des allocations d’activité partielle versées par l’État, voire des poursuites pénales.

L’activité partielle, jusqu’à quand ? 

Etat d’urgence sanitaire rétabli à partir du 17 octobre 2020

« Instauré pour deux mois par la loi du 23 mars 2020, l’état d’urgence sanitaire a été prolongé une fois jusqu’au 10 juillet inclus. La loi du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire met en place un régime transitoire à partir du 11 juillet qui autorise le gouvernement à prendre des mesures exceptionnelles jusqu’au 31 octobre 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19. » https://www.vie-publique.fr/

Le projet de loi prorogeant ce régime transitoire jusqu’au 1er avril 2021 adopté le 1er octobre 2020 a été suspendu par le gouvernement. Le décret du 14 octobre 2020 rétabli l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire de la République à compter du 17 octobre 2020 à 0 heure.

Depuis le zones en alerte maximale sont placées sous couvre-feu entre 21h et 6h du matin sans dérogation pour la culture. Le 23 Octobre 2020, il est étendu  à 54 département et la polynésie française pour 6 semaine ( zones susceptibles d’étre modifiées en fonction de l’évolution de la pandémie)

Accès à l’activité partielle jusqu’au 31 décembre 2020

L’évolution de l’épidémie contraint les autorités à prendre des décisions fluctuantes. Les activités et manifestations culturelles tour à tour autorisées ou annulées replongent les structures dans une situation analogue au confinement et justifient de nouvelles demandes d’activité partielle. Les secteurs les plus touchés, dont fait partie la culture, conserveront un accès à l’activité partielle jusqu’à la fin de l’année.

La prise en charge à 100 % de l’activité partielle par l’État pour les entreprises de l’événementiel, de la culture, des opérateurs de voyage, de séjour et du sport est maintenue jusqu’au 31 décembre 2020. Soit 100 % du salaire net pour les salariés au SMIC et 84 % environ du net dans la limite de 4,5 SMIC.

Suite à la mise en place de nouvelles mesures restrictives, les mesures transversales sont etendues pendant toute la durée du couvre-feu aux structures des secteurs économiques impactés. Parmis elles : le renforcement du fonds de solidarité, l’exonération des cotisations sociales, le prolongement des prêts garantis par l’état  et l’accès au dispositif de l’activité partielle.

115 millions d’euros de mesures spécifiques complémentaires pour la culture sont annoncées par Roselyne  Bachelot ce 22 Octobre  2020. 

85 Millions pour le secteur du spectacle vivant et 30 millions pour le cinéma ( voir les informations sur le site profession-spectacle.com) 

Année blanche pour les intermittents du spectacle jusqu’au 31 août 2021

Pour les intermittents du spectacle relevant des annexes 8 et 10 qui justifient d’une date anniversaire ou d’une fin de droits aux allocations qui se situe entre le 1er mars 2020 et le 30 août 2021 inclus, les mesures d’urgence au règlement d’assurance chômage sont les suivantes :
– prolongation exceptionnelle de l’indemnisation jusqu’au 31 août 2021, avec le report de la date anniversaire ou de la fin de droit à cette date ;
– examen spécifique de renouvellement des droits au 1er septembre 2021.

En sortie d’état d’urgence et en l’absence de nouveau texte, le régime de droit commun s’appliquera. Un brin d’optimisme nous pousse à espérer qu’il reprenne sa place au plus vite !

 Christelle Barrilliet